INTRODUCTION ET OBJET
La Table ronde nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées vise à :
La Table ronde nationale regroupe les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux en partenariat avec les organisations autochtones nationales (OAN) pour discuter de la meilleure façon de collaborer et de coordonner les actions à prendre afin de contrer la violence faite aux femmes et aux filles autochtones, notamment lorsqu'elle mène à leur assassinat ou leur disparition. Comme il a été mentionné dans le Plan d’action fédéral 2014 pour contrer la violence familiale et les crimes violents à l’endroit des femmes et des filles autochtones, « …aucun organisme ni ordre de gouvernement ne pourra enrayer seul cette violence. Le travail nécessite non seulement un partenariat entre les organismes fédéraux, mais aussi un partenariat avec les provinces et les territoires et, surtout, avec les communautés et les organismes autochtones ».
Toutes les femmes et tous les enfants autochtones ont eux aussi le droit de vivre sans violence ni discrimination aucune. Au cours des dernières années, des initiatives ont visé à répondre à la prévalence de la violence faite aux femmes et aux filles autochtones, et aux taux excessifs de disparitions et d’assassinats au Canada. Les communautés et administrations autochtones de même que les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont instauré tout un éventail de solutions et d’interventions, sans qu'une réponse complète et coordonnée ait été mise en place. Une telle réponse devrait attirer l'attention, sensibiliser et faire converger les actions vers la prévention et des solutions immédiates, tout en permettant la flexibilité et la prise de décisions sur la scène locale.
Afin de faire avancer le dialogue à la Table ronde, sur la question du nombre excessif de femmes et de filles autochtones disparues et assassinées, et de lancer une intervention concertée, les trois priorités suivantes ont été dégagées comme thèmes de discussion :
PRINCIPES
Il y a consensus que des interventions supplémentaires s’imposent maintenant et que des efforts accrus sont nécessaires pour réaliser des progrès et faire en sorte que soit assuré par tout ce qu’il est possible de faire la sécurité des femmes et des filles autochtones. La Table ronde nationale est une occasion unique pour les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux de se réunir avec des OAN et des représentants des familles éprouvées pour coordonner les interventions, les mesures de prévention et les solutions.
Il est souhaité que la Table ronde nationale donne lieu à des engagements portant sur la prévention, la réduction et l’élimination de la violence faite aux femmes et aux filles autochtones et axés avant tout sur les trois domaines prioritaires. Les parties à la Table ronde nationale considèrent comme élément important de ce cadre de discussion leur accord sur un ensemble de principes communs qui guideront leur travail pour prévenir et contrer la violence faite aux femmes et aux filles autochtones constitue une assise importante ce cadre. Les parties à la Table ronde approuvent les principes suivants :
Droits de la personne : La violence à l'endroit des femmes et des filles autochtones porte atteinte à de nombreux droits de la personne, notamment le droit à la vie, à la sécurité et à l'égalité, ainsi qu'à une vie sans discrimination.
Responsabilité conjointe : La prévention et la lutte contre la violence faite aux femmes et aux enfants autochtones constituent une responsabilité conjointe, et des engagements communs entre les gouvernements et les communautés s’imposent pour s’en acquitter.
Solutions communautaires : Les solutions afin de prévenir la violence faite aux femmes et aux filles autochtones et d’y mettre fin doivent provenir des communautés, permettre de reconnaître la diversité des réalités et de renforcer les réponses communautaires.
Convergence vers la guérison : La lutte contre la violence faite aux femmes et aux enfants autochtones nécessite de développer des relations entre Canadiens autochtones et non autochtones fondées sur le respect et la compréhension, ainsi que des approches holistiques favorables à la guérison des personnes et des communautés.
Convergence axée sur la collaboration : Les Autochtones doivent être des partenaires dans l’élaboration et l’application de solutions visant à contrer la violence faite aux femmes et aux filles autochtones.
Modification des comportements : La lutte et la prévention contre la violence faite aux femmes et aux filles autochtones exigent des changements d’attitude et de comportements chez les personnes, au sein des institutions et des organisations, et notamment chez les hommes et les garçons, qui en deviennent des agents de changement.
Changer les discours : En mobilisant les communautés autochtones et non autochtones à changer la façon dont nous discutons de ces problèmes, nous pouvons contribuer à recadrer les réponses institutionnelles, les perspectives communautaires et les attitudes individuelles.
Ces principes se dégagent des récents rapports, mentionnés dans le présent document, qui ont identifiés les voies à suivre dans l’élaboration de stratégies communautaires visant à mettre fin à la violence faite aux femmes et aux filles autochtones.
LES VOIES À SUIVRE
Dans le sillage de la Table ronde nationale, le gouvernement fédéral, les gouvernements des provinces et des territoires et les OAN coordonneront leurs efforts vers la prise de mesures concrètes et immédiates dans chacun des domaines prioritaires. Il s’agira globalement d’un engagement pan-canadien conjoint en vue d’une collaboration soutenue et accrue, comportant l’élaboration de solutions régionales fondées sur les communautés, et mise en œuvre par ces dernières afin de prévenir et de contrer la violence faite aux femmes et aux filles autochtones.
Les parties à la Table ronde nationale ont convenu d’améliorer la coordination et la collaboration entre leurs différents secteurs et entre elles, en fonction des grands volets suivants, en reconnaissant que ces domaines sont fondamentalement interdépendants et qu’il ne faut pas les aborder de manière isolée.
Les parties continuent d’examiner des exemples précis de la façon dont ces volets pourraient être instaurés. Les moyens et les processus de mise en œuvre varieront en fonction des relations et des priorités entre, d’une part, les communautés et les organisations autochtones et, d’autre part, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux.
Prévention et sensibilisation
Sécurité des collectivités
Mesures policières et interventions judiciaires
SUIVI ET PARTAGE DES RÉSULTATS
Toutes les parties à la Table ronde nationale s’engagent à continuer de conjuguer leurs efforts pour coordonner les interventions visant à prévenir et à éliminer la violence faite aux femmes et aux filles autochtones. Afin de consolider encore davantage ces efforts, une deuxième Table ronde nationale aura lieu d’ici la fin de 2016 pour discuter des progrès réalisés, échanger sur les efforts en cours et poursuivre le dialogue sur d’autres efforts à envisager. Toutes les parties s’engagent à travailler directement avec les communautés et les organisations autochtones pour donner suite à ces priorités et préparer la deuxième Table ronde nationale.
HISTORIQUE/CONTEXTE
Il va sans dire qu’il existe depuis longtemps des enjeux sous-jacents complexes qui ont conduit aujourd’hui à un taux disproportionnément élevé de violence à l’égard des femmes et des filles autochtones, et qui perpétuent cette situation critique. Les femmes et les filles autochtones sont trois fois plus susceptibles d’être victimes de violence que les femmes non autochtones, et cette violence est plus grave. En mai 2014, la Gendarmerie royale du Canada a dévoilé un aperçu opérationnel national sur les femmes autochtones disparues ou assassinées. La recherche identifiait dans les bases de données de la police canadienne 1 181 femmes autochtones disparues ou assassinées entre 1980 et 2012. De ce nombre, 1 017 avaient été assassinées. Aujourd’hui, 164 enquêtes sur des disparitions de femmes autochtones sont toujours en cours, et certains dossiers remontent à 1952.
Les Autochtones ne forment pas un groupe homogène sur les plans culturel, traditionnel ou géographique. Il existe, entre les Premières Nations, les Inuits et les Métis, des distinctions et une diversité qui reposent sur de nombreux facteurs, comme la langue, les croyances culturelles, les structures sociales, la situation géographique, les structures de gouvernance et l’existence de traités et d’autres accords avec l’État dans certains domaines. Cela signifie que les solutions efficaces doivent provenir des communautés et être pilotées par ces dernières. Compte tenu de cette diversité et des différences dans les résultats dans la diversité des Premières Nations, des Inuits et des Métis, il faut s’efforcer de formuler des réponses qui tiennent compte de ces différences. En outre, il faut prendre en compte les besoins et les points de vue variés des femmes, des jeunes, des aînés et des populations urbaines, nordiques et éloignées.
La sécurité et le bien-être des femmes et des filles autochtones font partie intégrante de la santé et du bien-être des familles, des communautés et des nations autochtones au Canada. Il n’y a pas de rôle plus important des gouvernements ou de l’État que de protéger les citoyens. De même, il n’y a pas de rôle plus important pour les familles ou les communautés que celui de se protéger entre elles et de promouvoir la sécurité.
Nombre de rapports, de forums et d’enquêtes ont attiré l’attention sur cette grande question, y compris la Commission royale sur les peuples autochtones (1996), l’Enquête sur la justice autochtone réalisée au Manitoba en 1999, le rapport On a volé la vie de nos sœurs d’Amnistie Internationale (2004), la Commission d’enquête sur les femmes disparues de la Colombie-Britannique de 2012, le rapport de la Commission interaméricaine des droits de l’homme sur les femmes autochtones disparues et assassinées en Colombie-Britannique (2014) ainsi que les rapports de chacun des Sommets nationaux des femmes autochtones qui ont eu lieu de 2007 à 2014.
Les administrations et les communautés autochtones ont répondu par tout un éventail d’activités. En outre, des efforts multilatéraux sont en cours afin de lutter contre la violence faite aux femmes et aux filles autochtones au Canada. Des cadres ont été créés par le Groupe de travail sur les affaires autochtones (Cadre de coordination des interventions visant à mettre fin à la violence faite aux femmes et aux filles autochtones)de même queles ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables de la Justice et de la Sécurité publique (Cadre juridique provisoire visant la lutte contre la violence faite aux femmes et aux filles autochtones), et le Forum des ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables de la condition féminine a approuvé la déclaration d’Iqaluit adoptée en 2007 pour lutter contre la violence faite aux femmes.
Sur la scène fédérale, un Comité parlementaire spécial sur la violence faite aux femmes autochtones a dévoilé son rapport intitulé Femmes invisibles : Un appel à l’action – Un rapport sur les femmes autochtones portées disparues ou assassinées au Canada en mars 2014. Le gouvernement du Canada y a répondu en septembre 2014, dans son Plan d’action fédéral 2014 pour contrer la violence familiale et les crimes violents à l’endroit des femmes et des filles autochtones.
(1)Le terme « Autochtones » s’entend des Inuits, des Métis et des membres des Premières Nations au Canada. Les parties à la Table ronde nationale reconnaissent les besoins particuliers qu’il faut distinguer selon les régions urbaines, rurales et nordiques, la vie dans les réserves et à l’extérieur de celles‑ci, les conditions dans l'Inuit Nunangat, l’application de la Loi sur les Indiens et les questions hommes-femmes.